tricoter, coudre, broder… analyse psychologique des travaux d’aiguilles

Dans l’histoire, si l’on considère la broderie, l’activité créative la plus pratiquée par les femmes, le premier mot qui vient à l’esprit serait régression.

C’est un savoir-faire classique avec des gestes millénaires qui s’inscrivent dans une tradition qu’on pourrait presque qualifier de réactionnaire.

Héroïnes imaginaires, Pénélope et la reine qui enfantera Blanche-Neige sont des femmes qui attendent, l’une son mari et l’autre un enfant à naître, tout en tirant l’aiguille. Elles sont perçues comme peu dangereuses.

Une femme qui s’adonne aux travaux d’aiguilles peut être une femme rassurante et sexy à la fois. Une image idéale pour bien des hommes.

Les travaux d’aiguilles pourraient aussi suggérer une légère tendance à l’autisme.

Les femmes qui brodent sont généralement focalisées sur leur ouvrage, concentrées sur cette activité qui à la fois occupe l’esprit et le libère des turbulences de la pensée.

Rien de plus déstressant qu’une activité manuelle qui accapare l’attention.

Tout en maniant l’aiguille, elles regardent quelquefois dans le même temps la télévision, un peu comme on écoute la radio, juste avec le son et une image de temps à autre, pour ne pas perdre le fil de l’histoire et de leur ouvrage.

Les motivations des femmes sont très différentes suivant leur âge.

Les jeunes mères brodent ou tricotent pour des raisons que l’on peut qualifier de préoccupation maternelle. C’est un moment de la vie où elles sont centrées sur elles-mêmes et leur progéniture à venir.

En réalisant un bavoir ou des chaussons, elles prennent en quelque sorte soin de l’enfant qui va naître, par le biais d’un objet qui le concrétise.

Les jeunes filles qui brodent le font pour d’autres raisons dans lesquelles la personnalisation, l’affirmation d’une certaine image de soi, joue un grand rôle. En "coloriant avec du coton" sur leur veste en jean un papillon, elles signifient ceci : ce vêtement unique est à moi.

Pour le tricot, on peut s’interroger sur ce que signifie le fait de passer de la tendance Café Philo à la tendance Café Tricot.

Les journaux de mode vendent l’image d’une Julia Roberts tricotant sur les plateaux de cinéma. Ce modèle rassurant vient contrer une autre image plus menaçante, celle d’une femme très désirable, qui joue de son sex-appeal à l’écran.

N’oublions pas que les hommes, s’ils sont intéressés par ce cliché rassurant, peuvent se lancer le défi de s’approprier la belle en lui arrachant son tricot des mains.

Entretien réalisé auprès de Christine Angoujard psychologue et psychothérapeute.